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Les Comores, quèsaco?

Depuis les performances remarquables de l’équipe nationale des Comores à la Coupe d’Afrique des Nations (CAN)le monde s’intéresse à cet archipel situé dans l’océan indien. On insiste souvent sur la petitesse de leur superficie, 2033km, mais on oublie de mentionner que, de par leur histoire, les Comores sont un pays-monde. Quelques informations sur ce pays, que wiki ne donnent pas, nous le présenteront de manière un peu plus approndie.

Signalons d’abord que les Comores se disent toujours au pluriel et s’accordent au féminin, et ce autant en arabe, comme on le verra, qu’en français. Ainsi dit-on, par exemple, « Les Comores sont un pays  » et non « Les Comores est un pays ». Comme on dit « les Comores » et non « le/la Comores ».

D’où vient cette appellation? Trois hypothèses se disputent à ce sujet. Deux la lient aux mots arabes « Qumriyyu », « Un oiseau à l’abdomen blanc », que les marins arabes auraient trouvé en grande quantité dans ces îles; et « Qamar » « lune », que les mêmes y auraient trouvée particulièrement éclatante. La troisième la lie à l’expression comorienne « ko moro », « viens voir le feu ».

Cette dernière paraît d’autant plus bancale que le nom apparaît nettement sur les cartes les plus anciennes des géographes et explorateurs arabes, comme Ibn Mâgid, Ibn Khaldûn, Yâqût al-Rûmî, etc. Précisons que situé à équidistance entre les côtes est-africaines et Madagascar, nos géographes et explorateurs arabes l’appelaient « juzur l-qamar » « les îles de la lune » en les regroupant avec Madagascar, qu’ils considéraient comme la plus grande île du monde, après la péninsule arabique, comme on peut le lire très facilement dans les vers d’Ibn Mâgid parlant de Sofala, où il cite nommément (m en 1500 ap. J-C) l’île d’Angzidja, la Grande-Comore.

Quant à leurs habitants, ils sont un melting pot, issu d’Asiatiques, les Malayos, venus essentiellement d’Indonésie, d’Est-Africains, venus, entre autres, de Mozambique, d’Arabes, venus essentiellement d’Oman et du Yémen. Dans son épître, Tarikh Jazîrat l-qamar l-kubrâ, (Histoire de la Grande-Comore) Burhan Mkelle, un des éminents spécialistes de la langue et de la poésie arabes, sur la côte est-africaine, écrit au milieu du siècle dernier, que les premiers habitants des Comores étaient des Malayos, des Arabes et des Juifs. Il précise au sujet de ces derniers que la présence de mots comme « Yahowa » (jeudi) dans la langue comorienne et de Bunu, qui serait le Ben hébreu, dans l’onomastique comorienne, en serait la preuve. Mais, tout en reconnaissant la faiblesse de cet argument, il note que la présence des juifs parmi les premiers habitants de cet archipel faisait partie des légendes les plus anciennes. Ce qui en fait, à l’en croire, une donnée des plus fiables. Une composante indienne est venue beaucoup plus tard, au 16ème siècle, enrichir la bigarrure de ce peuple, ainsi que quelques Portugais, dont les tombes sont encore visibles aujourd’hui au Nord de la Grande-Comore, dans la région du Washili.

L’islam, toujours selon Monsieur Mkelle, aurait réuni ces trois composantes auxquelles est venue s’ajouter la composante est-africaine, pour en faire un peuple, un pays, malgré l’insularité.

On y parle le comorien (soi/ki-komori), une langue bantu, à l’instar du swahili, avec qui il formait la même langue jusqu’au 12ème siècle, selon Nurse et Philippson, dans leur Bantu Languages. Comme le swahili, il est très arabisé – on estime que le lexique du comorien est à plus de 30% arabe – et a perdu le ton, un des deux traits saillants des langues bantu, avec le système des classes nominales.

Les Comores forment un archipel de quatre îles, qui fonctionnaient, avant la colonisation, comme des sultanats. D’ailleurs, l’inscription des traces de ces derniers au patrimoine mondial de l’humanité est en cours.

L’islam y serait arrivé dès le premier siècle, d’après les légendes. Un des enfants du troisième calife de l’islam, Unthman b. ‘Affân, y serait même enterré, au nord de la grande île. Malgré le retour des universités saoudiennes de nombreux étudiants comoriens, depuis les années 70, l’islam comorien reste encore aujourd’hui dominé par le soufisme et de rite shafiite.

Nos valeureux coelacanthes (Gombesa), ce poisson pré-historique qui se trouverait exclusivement dans les mers comoriennes, sont porteurs de toute cette histoire et les dignes fils de ce pays-monde, où entre autres choses, le foncier appartient quasi exclusivement à la femme, ce qui fait qu’en cas de divorce, c’est l’homme qui quitte le domicile, qui ne lui appartient souvent pas, et non la femme. Des mosquées pour femmes existent – qui s’appellent mbuni. Il y existe un système de lignage, qui lie l’individu toujours et définitivement à la lignée de sa mère.

Ce mariage de sangs et de cultures a produit ce peuple, on ne peut plus pacifiste, dont la cuisine est très indienne, l’essentiel des habits traditionnels arabe, la musique afro-arabe, et une pratique de l’islam des plus tolérantes qui soient, malgré les vociférations de certains.

Merci à nos champions pour avoir permis de faire connaître ce pays aux milles et une beautés. Plus que par les hydrocarbures qui existeraient à des quantités vertigineuses dans leurs eaux territoriales, les Comores sont riches par leurs enfants, leur hospitalité et leur esprit de consensus et de quête permanente de conciliation.

Comoriennement, donc universellement, vôtre.

M.B

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