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« Je m’appelle Saïrati Assimakou, j’ai décidé de parler de mon viol »

Témoignage: Je m’appelle Saïrati ASSIMAKOU, j’ai 27 ans, originaire de Chiconi et digne fille de Maman Nabilou.

Dans l’angoisse d’une libération de parole à venir. Il y a forcément le doute, la gêne ainsi que la peur de devoir affronter le regard de celles et ceux qui minimiseront toujours nos maux !
Lorsque j’ai décidé de parler publiquement de mon viol. JAMAIS je me suis dit, que j’aurais honte d’affronter le regard des membres de ma famille. Ma crainte a toujours été celle d’être crus ou pas ! Aujourd’hui, je n’ai plus cette crainte.
Presque trois ans après cette Libération de la parole, me voici de retours sur les lieux du crime.
Sur cette même terre qui a vu couler mes larmes. Cette même maison qui a vu couler mon sang. Cette même île qui a vu ma dignité fondre sous les coups de plaisirs de celui qui était père.
Depuis une semaine, j’arpente fièrement les rues de Mayotte. C’est une première pour moi. En général, je venais pour raser les murs, pour baisser la tête, pour subir mon existence.
C’est comme si j’étais en apnée pendant toutes ces années et que pour la 1ere fois, je reprenais mon souffle.

De là, où j’ai grandi, beaucoup me dévisagent, font des messes basses lorsqu’ils me voient et se moquent de ma condition.
Vous me regardez comme celle qui dit avoir été violée par son père. Et c’est vrai !
Vous me reconnaissez comme celle qui n’arrête pas de raconter sa vie sur Facebook. Et c’est vrai !
Vous parlez de moi comme étant la marginale qui a laissé tomber tous ses codes sociaux au détriment d’une déchéance familiale. Et c’est vrai !
Et surtout, vous me reconnaissez comme celle qui ne connaît pas la honte. VOUS AVEZ RAISON ! Je ne m’assois plus avec la honte, nous en avons fini avec nos copinages…

Je n’ai encore pas encore fini ce pourquoi je suis venue, mais je sais d’avance que la petite fille que j’étais est fière de ce parcours. Fière de voir que j’affronte les regards de mes semblables qui me méprisent, sans aucune forme de honte…
Venir arpenter les rues de là où beaucoup ne veulent pas me voir est une vraie thérapie ! Montrer si besoin était que de ma condition de personne victime, jamais je n’en aurais honte.
De mes viols, j’en parlerai ! À Mayotte ou ailleurs. Et si je dois tout perdre pour cela, qu’il en soit ainsi !
Mais je n’aurais pas de cesse de le dire ! Mon géniteur m’a violée et ma famille m’a tué !
Parce que culturellement, c’est comme ça… Nous grandissons en apprenant qu’il faut « encaisser » les douleurs au lieu de les « partager ».
Pourtant, il y a une joie dans la parole que vous n’aurez jamais dans le silence !
Cette sensation de plénitude face à une vérité accablante qui n’échappe plus au regard d’aucuns d’entre nous.
Ce poids en moins sur nos épaules et surtout, une meilleure santé, mentale/physique.

Merci, à celles et ceux qui me regardent de loin, se demandant, quel est ce spécimen bizarre ?
Merci, parce que vos interrogations vous mèneront forcément à mon histoire. Vous saurez alors, que vous le vouliez ou pas, que la parole est possible, POUR TOUTES ET TOUS !

Merci aussi à celles et ceux qui m’ont reconnu et qui sont venus vers moi. Merci pour nos moments d’échanges. Merci pour vos larmes et vos sourires. Merci de me rappeler que si le combat est loin d’être gagné, il a au moins le mérite d’exister. Merci pour votre bienveillance. Merci pour vos cadeaux.
Pour celles et ceux qui m’envoient des messages, je n’ai aucun problème pour vous voir, mais je conduis très difficilement ici. Alors, déplacez-vous et nous échangerons avec grand plaisir !

Parce que mon histoire est aussi l’histoire de plusieurs petites filles et petits garçons à Mayotte, mobilisons-nous toutes et tous :
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https://www.wamitoo.yt/

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