Aux élections européennes de 2024, le Rassemblement national (RN) a une fois de plus démontré sa capacité à capter le vote protestataire en France, atteignant 31,57 % des voix selon les chiffres presque définitifs du ministère de l’Intérieur. Parmi les territoires où le parti a particulièrement brillé, l’île de Mayotte se distingue de manière significative avec un soutien de 52,4 %.
Ce résultat massif à Mayotte, une île comorienne mais sous administration française, soulève de nombreuses questions sur les motivations des électeurs. Pour plusieurs observateurs politiques, ce vote en faveur du RN ne reflète pas seulement un soutien aux politiques eurosceptiques et nationalistes du parti, mais aussi un rejet des Comoriens vivant sur l’île.
Mayotte, confrontée à une immigration importante en provenance des autres îles Comores, connaît depuis des années des tensions croissantes entre la population locale et les nouveaux arrivants. Les discours du RN, souvent axés sur la lutte contre l’immigration, trouvent ainsi un écho particulier dans ce contexte.
Jordan Bardella, chef de file du RN, a su capitaliser sur ces tensions en adoptant une rhétorique forte contre l’immigration, perçue comme une menace par une partie des Mahorais. En promettant des mesures fermes pour contrôler les flux migratoires, Bardella a réussi à convaincre une majorité d’électeurs à Mayotte de lui accorder leur confiance.
Mais au-delà des discours, il est crucial de comprendre ce vote comme un cri de désespoir d’une population confrontée à des défis socio-économiques majeurs. Mayotte est l’un des départements les plus pauvres de France, avec un taux de chômage extrêmement élevé et des infrastructures souvent insuffisantes. Dans ce contexte, le vote RN apparaît pour beaucoup comme un dernier recours, une tentative de changement face à un sentiment d’abandon par l’État.
Le choix de Mayotte en faveur du RN pourrait avoir des conséquences profondes pour l’île. D’une part, il risque de renforcer les divisions internes et les tensions avec les Comoriens, exacerbant ainsi les conflits communautaires. D’autre part, il pose la question de l’avenir des relations de l’île avec le reste de l’Union européenne, alors que le RN prône une réduction drastique des pouvoirs de Bruxelles.
Misbah Saïd
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