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Viols sur les enfants, disons stop !

L’art est une terre sur laquelle celles et ceux qui, un jour ils se décident d’y poser un pied, d’y apposer une empreinte, ils s’engagent dans un pacte social coriace mais noble. Pour chaque art, l’artiste a, non seulement un message à faire passer, mais aussi et surtout un serment ficelé, une promesse dite et qu’il faut tenir.

La difficulté ? En s’engageant, l’artiste ne s’isole pas. Et c’est là que sa bataille trouve un sens. Il s’engage pour une cause, celle-ci n’étant pas directement assimilée à sa personne, mais à l’autre. L’œuvre est cet outil précieux, objet essentiel d’un pacte naturellement certifié entre l’artiste et l’autre, celui-ci, n’étant rien ni personne, que le public. La posture, la distance mesurée et brodée entre ce public et l’artiste ne nuit en rien quant au message que l’artiste veut faire passer. Qu’il soit joyeux, triste ou encore humoristique, ce message véhiculé par l’œuvre en question impose quelque chose de très fort chez les autres : l’émotion ! Il y en a même celles et ceux qui vont encore plus loin lorsqu’ils joignent leurs témoignages à leurs nobles messages artistiques.

C’est ce qui m’a le plus marqué, ce mercredi 17 juin 2020, lorsque j’ai suivi, avec intérêt le témoignage sensitif des trois artistes comoriens (Zilé, Zaza et Soultoine) avant de nous faire écouter une chanson en trio intitulée « Pédophile ». En effet, ce trio de musiciens, tous comoriens résidents en France a rendu publique une chanson contre les viols faits aux enfants, aux Comores, leur pays, le nôtre aussi. Leurs paroles piquantes que s’est élaborées ce mixage de voix, très remontées et nettement engagées interviennent dans un contexte particulier où les actes de viols sur les enfants se multiplient dans le pays, amplifiant le sentiment d’insécurité des victimes et l’émoi chez les parents, au sein de la société civile et au regard des institutions internationales comme l’Unicef.

Le dernier acte en date est recensé, dimanche 14 juin 2020, à Domoni-Anjouan où un homme à la trentaine s’est fait lynché (ce qui est regrettable et outrageant aussi) pour avoir violé un enfant de six ans. Alors que l’Afrique a célébré ce 16 juin 2020 la Journée internationale de l’enfant africain sous le thème de l’accès à une justice adaptée aux enfants africains », l’on ne demande que justice soit faite aux Comores contre ces « gros pervers » prédateurs dangereux.

Dans une vidéo, nos trois artistes révèlent aux yeux de tout le monde, non pas le fait divers en soi particulièrement connu du public grâce aux réseaux sociaux, mais s’émeuvent, suite à un phénomène devenu monnaie courante dans le pays. De nombreux enfants se font violer dans notre pays ces derniers temps, ce qui provoque en nous une émotion très forte. A la question « que dire de l’art pour dénoncer ? », ces artistes y ont trouvé des premiers éléments de réponses : disons simplement stop ! La situation est tellement critique que l’artiste « ne sait même pas par où commencer », a dit Zilé, l’auteur compositeur du couplet, à l’ouverture joli trio rythmé au « débé lafungwa yayeni ». Suivra ensuite deux autres voix consonantes très familières aux Comoriens, notamment celles de l’incontournable Zaza et du célèbre chanteur de toirab, Soultoine.

L’art, qu’il soit musicale, littéraire ou autre, reste donc ce mode d’expression où l’on prend position face à ce qui nous semble intolérable. L’artiste prend ainsi la parole pour ceux qui n’en disposent pas. Et justement, les enfants, nos enfants victimes de ces violences atroces perpétrées de plus en plus aujourd’hui par des adultes, les mêmes censés les protéger, est un crime qu’il faut dénoncer. Cela peut se faire au village, dans nos différentes tribunes sociopolitiques et juridiques. Salim Ali Amir en a déjà l’habitude de dénoncer ces abus. En 2006, il a sorti son titre « Pédophilie » où l’auteur de « Ripvirwa » décrit le déclin crépusculaire comme heure propice des prédateurs. Comme les artistes, dénonçons ensemble ces actes ignobles. Faisons-en une querelle, une lutte, un combat primordial et indispensable pour eux et pour notre avenir.

Abdoulatuf BACAR, Enseignant

Source : LGDC

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