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Loi sur le statut de l’opposition I Le ministre de l’Intérieur revient sur la mise en application devenue hypothétique

C’était une promesse faite par le chef de l’Etat le 26 mai 2019 lors de son investiture au stade de Maluzini. L’opposition est désormais dotée d’un statut. Porté par l’exécutif, le projet de loi a été adopté la semaine dernière par les députés à l’Assemblée nationale. Une « première » selon le ministre des élections, Fakridine Mahamoud. Celui que nous avons rencontré à son bureau ce mercredi matin assure que la promulgation du texte “devrait intervenir d’ici trois semaines”.

Nos échanges ont été ponctués par une discussion animée autour de la mise en application de la loi. La configuration actuelle de l’opposition politique ne répond pas aux conditions prévues par le texte. Faudra-t-il attendre la prochaine échéance présidentielle pour voir son application ? Notre interlocuteur concède que “la mise en pratique pourrait être compliquée”. Mais précise qu’une loi est faite pour “la postériorité” et qu’elle était dans tous les cas “perfectible”. L’article 3 de la loi sur le statut de l’opposition dispose que “l’opposition est parlementaire ou extraparlementaire selon qu’elle est représentée ou non au sein ou en dehors des institutions étatiques”. Aux dernières élections harmonisées (législatives et communales) de 2020, l’opposition a opté pour le boycott si bien qu’elle n’est  pas représentée à l’Assemblée nationale et dans les conseils municipaux. “Après des élections législatives ou communales, les groupes politiques remplissant les conditions de l’article 3 cité précédemment s’organisent et désignent le chef de l’opposition”, dit l’article 20, un critère que ne remplit évidemment pas l’opposition.

La Convention pour le Renouveau des Comores (principale formation au pouvoir) dispose de la majorité parlementaire. Elle est suivie de loin par le parti Orange de l’ancien ministre de l’Intérieur, Mohamed Daoudou. Celui-ci dispose de deux députés (sur les 24 que compte le parlement) et d’une kyrielle de conseillers communaux. « Kiki de la République », débarqué du gouvernement en août 2021 n’a pas encore fait de déclaration au sujet de son positionnement politique, ce qui le disqualifie d’office des partis de l’opposition comme dit dans l’article 5 : “l’appartenance à l’opposition d’un parti politique ou d’un groupement des partis politiques doit faire l’objet d’une déclaration officielle et publique (…)”.

La loi a cependant prévu un autre cas de figure : la possibilité que l’opposition soit extraparlementaire, comme c’est le cas actuellement même si ce n’est pas aussi évident. “Le chef de l’opposition est le chef du parti politique ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages exprimées à la dernière élection présidentielle”. En 2019, le candidat Azali Assoumani est passé dès le premier tour avec 60% des voix selon la section administrative et électorale de la Cour suprême. Il est suivi par Mahamoudou Ahamada (un peu plus de 14%) et Mouigni Baraka Saïd Soilihi (5,57%) ; tous deux étaient des candidats indépendants. Le parti Juwa (parti d’opposition) avait présenté Ibrahim Mohamed Soulé comme titulaire mais sa candidature a été éliminée. Si le Juwa avait soutenu de fait l’avocat de l’ancien président Sambi, celui -ci s’était présenté en « indépendant » et servait ainsi de « joker ».


Il y a aussi le cas de l’ancien gouverneur de l’île de Ngazidja, Mouigni Baraka Saïd Soilihi. Son parti, le RDC, a été confronté à une guerre de chefs opposant le camp de Mouigni Baraka à celui de son ancien ami, Djae Ahmada Chanfi, actuel ministre de la justice. La justice a donné raison à ce dernier en 2017 pour représenter le parti si bien que 2 ans plus tard, Mouigni Baraka Saïd Soilihi n’a eu d’autre choix que celui de se présenter à la présidentielle “en candidat libre”. Résultat : le seul parti qui a recueilli des suffrages lors de la dernière échéance présidentielle et qui répond donc à l’article 3 en ce qui concerne l’opposition extraparlementaire, est la principale formation au pouvoir.

Le texte qui “a le mérite d’exister”, dixit Fakridine Mahamoud, prévoit également des avantages financiers pour l’heureux responsable. “Le chef de l’opposition dispose de ressources humaines, matérielles et financières liées à sa fonction”, indique l’article 19. Il précise : “le chef de l’opposition politique est le porte-parole de l’opposition politique”.Le leader de l’opposition apparaitra “dans l’ordre protocolaire et pourrait être impliqué dans les affaires de la nation”, a assuré le ministre de l’Intérieur. Celui-ci admet que “si jamais aucune des conditions prévues par la loi n’était réunie par les partis opposés au pouvoir, il n’était pas impossible qu’il soit demandé aux opposants de choisir”. A noter également que l’existence légale des partis politiques est soumise à des conditions. Pour l’heure, seuls la Crc et Orange répondent aux critères requis.

FSY Al-watwan

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