
Gaza n’est plus seulement un champ de ruines, c’est devenu un cimetière pour la liberté de la presse. Dimanche 10 août, cinq journalistes de la chaîne Al Jazeera ont été tués lors d’un bombardement israélien, un crime revendiqué sans détour par l’armée de Tel-Aviv. Parmi eux, Anas Al-Sharif, l’un des correspondants les plus respectés dans la couverture du quotidien gazaoui, a été assassiné après avoir été explicitement désigné comme « terroriste » par Israël — un prétexte usé jusqu’à la corde pour justifier l’élimination de voix dérangeantes.
Ce meurtre ciblé, assumé publiquement, démontre une fois de plus la stratégie implacable de l’État hébreu : réduire au silence quiconque documente ses crimes. Quatre autres journalistes — Mohammed Qreiqeh, Ibrahim Zaher, Mohammed Noufal et Moamen Aliwa — se trouvaient avec lui dans une tente de presse installée devant l’hôpital Al-Shifa. Une position clairement identifiée comme zone de travail journalistique. La frappe, selon Al Jazeera, relève d’une « attaque ciblée israélienne » visant à intimider et à censurer.
Depuis 22 mois, Gaza vit sous un siège de feu et de faim. Mais cette fois, ce n’est pas seulement la population civile qui est visée : c’est le droit même d’informer. En juillet dernier, le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) avait déjà accusé Israël de mener une « campagne de diffamation » contre Al-Sharif, en l’assimilant sans preuve crédible à un membre du Hamas. Pour Sara Qudah, directrice régionale du CPJ, la méthode israélienne consistant à assimiler les journalistes à des militants est une violation flagrante des conventions internationales : « Les journalistes sont des civils et ne doivent jamais être pris pour cible. Ceux qui sont responsables de ces meurtres doivent rendre des comptes. »
Ces cinq noms viennent grossir la liste macabre de près de 200 journalistes tués depuis le début de la guerre, selon Reporters sans frontières. Mais face à l’impunité totale dont jouit Israël sur la scène internationale, une question dérangeante s’impose : combien de reporters faudra-t-il encore sacrifier avant que la communauté mondiale cesse de détourner le regard ?
IBM
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