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Front commun des forces vives : L’opposition conditionne sa participation au dialogue

En réponse, le 26 octobre, à la lettre du président de la République du 13 octobre, le Front commun des forces vives a étalé ses souhaits dans un courrier dont le poids des mots laisse apparaître, à la fois, de la perplexité mais aussi de l’optimisme pour le devenir du pays. L’opposition se montre ainsi prête à participer à tout dialogue «qui mettrait courageusement sur la table les vraies questions pour y apporter des réponses». Les principaux opposants conditionnent leur éventuelle participation à toute discussion en échange des «mesures d’apaisement à défaut desquelles la voie du dialogue ne pourrait s’ouvrir».

Le Front commun des forces vives a exprimé sa disponibilité à prendre part à un dialogue à la seule condition si l’exécutif accepte, lui aussi, de lancer des signes de bonne volonté à l’endroit de l’opinion nationale et internationale, à commencer d’abord par la libération ou du moins l’assouplissement des conditions de détention des ténors et autres alliés de l’opposition. C’est ce qui ressort d’un courrier de trois pages, en date du mardi 26 octobre, signé par le secrétaire général du Front commun, Ahmed Hassane El-Barwane.

Le ton a changé mais les griefs restent en l’état

Si la forme du courrier n’obéit pas aux usages protocolaires, le fond marque un tournant de langage de l’opposition habituée aux joutes verbales violentes dans ses rapports réguliers avec le chef de l’Etat, Azali Assoumani. Les griefs contre le régime restent en l’état mais le ton a substantiellement changé, comparé aux discours chocs et aux communiqués incendiaires publiés depuis le référendum constitutionnel de juillet 2018.

Difficile de savoir si l’heure est à la désescalade mais tout laisse croire en une volonté de mettre fin à l’éternelle bipolarisation de la vie politique depuis l’élection du 24 mars 2019.

«Nous voulons croire que cette nouvelle correspondance n’est pas qu’une opération de communication et de séduction de l’opinion internationale, mais qu’elle porte une réelle volonté d’avancer», écrit le Front commun dans sa réponse, ajoutant avoir accueilli la lettre du chef de l’Etat «avec une sérieuse et particulière attention».

Faire bouger les lignes

Le président de la République, dans son courrier du 13 octobre, a souligné son vœu de rassembler toutes les couches socio-politiques dans «un dialogue franc, sincère et inclusif», indiquant vouloir préparer l’avenir du pays avec l’ensemble des forces politiques toutes tendances confondues. Mais les forces de l’opposition ne manquent pas de relever le manque d’un déclic concret, du côté du pouvoir, pour faire bouger les lignes et sortir du statut quo.

«L’impression générale que dégage le courrier que nous avons reçu veut faire croire à une ouverture dans le débat et à une disponibilité de l’exécutif dans la préparation, l’organisation et le déroulement», précise la réponse des opposants qui regrettent, ainsi, que leurs doléances ne soient toujours pas prises en compte et que cela les laisse perplexes quant à la volonté de tourner vraiment la page du dialogue de sourds.

«Nous relevons néanmoins que cette impression générale se veut l’arbre qui cacherait l’impasse faite sur l’essentiel des sérieuses préoccupations des Comoriens, soulevées dans notre correspondance et qui n’ont bénéficié du moindre début de considération», regrette le Front commun des forces vives. Mais les responsables ne souhaitent pas apparaitre comme la source du blocage et veulent renvoyer la balle au chef de l’Etat.

Poser les vraies questions et y apporter des réponses

Demandant des garanties et des faits concrets, le Front souligne que «suite à cet échange, nous prenons à témoins le peuple comorien et nos partenaires au développement» et que seuls ces derniers «se chargeront d’infirmer ou de confirmer le sentiment d’une évolution notable du débat national autour du dialogue voulu par tous et exigé par les graves circonstances actuelles», précise la lettre.
L’opposition a étalé ses souhaits dans un courrier dont le poids des mots laisse apparaître, à la fois, de la perplexité mais aussi de l’optimisme pour le devenir du pays.

L’opposition se montre ainsi prête à participer à tout dialogue «qui mettrait courageusement sur la table les vraies questions pour y apporter des réponses». Les principaux opposants conditionnent leur éventuelle participation à toute discussion en échange à de «mesures d’apaisement à défaut desquelles la voie du dialogue ne pourrait s’ouvrir».

Les opposants ravivent toujours leurs préoccupations pour le pays, insiste sur leurs doléances, dénoncent l’état de la société à tous les niveaux et réitère «le respect du cycle électoral issu de l’Accord historique de Fomboni aujourd’hui mis à plat par la révision aux forceps de 2018 et auquel nous restons pour notre part attaché» pour «une présidentielle anjouanaise cette année 2021 et mohelienne en 2026». Le Front commun donne l’impression de changer son fusil d’épaule sans pour autant manquer d’ardeurs pour défendre ses principes fondateurs.

«Le Front commun des Forces vives…voudrait insister, quant à lui, sur sa volonté et sa disponibilité totales et entières à participer à un dialogue dont le seul enjeu soit l’avenir des Comores», indique l’opposition. «Il est d’avis que les vœux les plus chers, les plus profonds et les plus partagés par le plus grand nombre de Comoriennes et de Comoriens est que s’ouvre maintenant une époque d’une nouvelle civilisation, une époque de bonne gouvernance économique, politique et sociale faite de justice, d’équité et de respect des normes», poursuit-elle.

Le courrier ne fournit pas les cibles des mesures d’apaisement. Mais les auteurs reviennent sur deux aspects clairs, à savoir le «retour de l’ordre constitutionnel» et la nécessité «d’apaiser les tensions» avant tout débat politique. «Chacun comprendra pourtant qu’il soit inconcevable d’organiser un dialogue dans un climat de terreur et ce, pendant que de nombreux citoyens notamment, de hauts dirigeants politiques croupissent en prison sans jugement depuis, trois, deux ou moins d’un an selon les cas», écrivent-ils.

«Les Comoriens et la communauté internationale sont dans l’attente des choix (qui vous plairont) de faire à ce sujet», souligne le courrier. «De fait, de vous, dépend le sort de ce dialogue, en vous repose la grande responsabilité de répondre à l’attente des Comoriens ou de la décevoir», précise encore le courrier qui laisse entrevoir, pour la première fois, les chances d’un possible début de rapprochement entre pouvoir et opposition en bisbille depuis trois ans.

A.S.Kemba / Alwatwan

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