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Pourquoi le boutre des hommes politiques comoriens a-t-il fait naufrage?

Maana hindrini ye djahazi yaho wandru wa siyasa wa Komori ya bisha?

Aujourd’hui, mon petit frère Mongozi Oppong a rapporté la proposition d’un des candidats qui participe dans le ngoma ya nyombe(le tambour battant des animaux) du commandant mdrema debe(le colonel-putschiste Azali), Salim Saadi. Ce dernier propose à la soi-disant opposition un retrait de toutes les candidatures. L’objectif est de se réunir pour soutenir un seul candidat capable de battre l’ex réfugié de l’Ambassade de France à Moroni. Quand j’ai lu cette proposition extraordinairement chimérique, j’ai pris du doliprane. Puis, je me suis dis: «Sipvuzi, ya ya riuwa hafu»(celui qui nous a lancés le mauvais sort est décédé). Mais pourquoi le vœu de ce jeune Salim Saadi est-il une chimère?

Pour répondre à cette question apocalyptique, on est obligé de faire un rappel historique cher à mon frère historien, Mahmoud Ibrahime. En 1990, au lendemain de l’assassinat de l’ancien président Ahmed Abdallah, la classe politique comorienne s’est réuni, dans un cadre de conférence nationale, au Palais du Peuple, à Moroni, pour soutenir un processus démocratique et un multipartisme(c’est un système qui mettait fin au parti unique). Certains participants ont proposé la mise en place d’une assemblée constituante qui aurait comme mission l’élaboration d’une vraie constitution. Celle-ci permettrait de doter à l’État Comoriens des institutions démocratiques. Hélas, ce projet n’a jamais connu. Pourquoi?

Avant la fin de la conférence nationale du Palais Peuple, la plupart des leaders politiques ont dit clairement que l’essentiel pour eux est l’organisation d’une élection présidentielle. Du coup, l’idée d’une assemblée constituante est reléguée au second plan et les chefs des grands partis se sont lancés dans une course présidentielle effrénée et rocambolesque(report de l’élection et coupure de l’électricité au moment du comptage dans certains bureaux de vote). Finalement, la multiplicité de candidatures dans le camp de l’opposition n’a fait que permettre l’élection du candidat du pouvoir, Djohar.

Ces désaccords et ces mésententes de la classe politique comoriens se sont poursuivis tout au long des années 90. En 1999, suite à l’accord d’Antananarivo(23avril), un certain colonel Azali Assoumani, un sous-fifre du système, a profité des dissensions stériles entre le pouvoir et l’opposition pour renverser par un coup d’État, le président par intérim, Tadjiddine.

Enfin, l’opposition actuelle n’est autre qu’une suite logique de celle d’avant. Néanmoins celle d’aujourd’hui est davantage émiettée et en manque cruel d’un grand leader charismatique(après la mise en résidence surveillée de Sambi, personne n’a pu s’imposer en tant que personnalité politique envergure nationale). De plus, cette apposition n’a pas de logique : elle initie le boycott du referendum du 30 juillet 2018 et elle participe à une mascarade élection présidentielle préconisée par ce même référendum. Par contre, la nouveauté de cette opposition est le passage obligé à Télé Sud ou à France 24 de leurs candidats à l’élection. Vivement la « mzirengologie »!
Par conséquent, cette classe politique comorienne n’a jamais été a la hauteur des différents enjeux politiques, économiques et sociaux car elle est minée par un clientélisme politique, une corruption qui est presque institutionnalisée, un égoïsme surdimensionné, un manque cruel de projets à long terme et un appétit du pouvoir pour le pouvoir. Mais le point culminant de son naufrage reste incontestablement l’absence totale d’un État de droit.

Ibrahim Barwane

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