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Moroni Déconfinée !

Enseignant de Philosophie au Lycée de Moroni, Mohamed Ali Mdroimdji Fait une Analyse Froide sur la Déliquescence de la ville de Moroni.

Nous ne sommes plus au temps du confinement pandémique mais aussi bien que l’on remonte dans l’histoire et la géographie de cette ville, autrefois appelée « Wundroni », elle fut toujours entourée de murs et d’un bras océanique. Fortifiée, sans doute, par une arrogance coloniale, une seule personne, une seule famille, ou maison royale pouvait immobiliser la vie dans la cité et décider du sort de ses membres. On prétendait pourtant qu’il faisait bon vivre malgré la négation de l’autre et la géhenne…wapambe, Mtrwana, mrumwa, Mroni.

Mais au demeurant, comme au temps de la Grèce antique, étaient éligibles et respectés les hommes libres ayant les droits de participer dans la vie politique, d’élaborer les lois et décider du sort des citoyens. En dehors du clan d’hommes libres, il y avait les esclaves, mtrwana et mshendzi pour ainsi dire. Il faut craindre ces manières d’être ancestrale, car il y a certainement quelque part une prolifération des mentalités qui s’arc-boute dans la conscience et que nous ne savons pas voir de nos jours.

Au fil de l’histoire avec l’extension et la modernité, l’appellation sémantique a changé, de Mroni à Moroni, mais il est des manières d’être ancestrales qui résistent à l’érosion du temps et des idées révolues et caducs.

Ceci étant dit, de multiples interrogations nous traversent, car il y a bien des résistances concrètes à mener dans ce lieu que nous sommes et où nous vivons car le soleil de l’histoire semble mener son cirque à chaque fois et qu’il est temps de bouleverser ces manières d’être ancestrales. Moroni demeure-t-elle toujours une propriété privé clanique, de locataires ou d’emprunts de parcelles ?

Quelles sont les personnes légitimes pour la gestion et la décision des affaires de cette ville ? Les affaires, toutes les affaires ! Est-ce l’autorité de l’Etat, les Wandru- Wadzima, les maguzi, les Wafomanamdji, les Wazuguwa, les Washondje ou les Wandru- Wadzima, et enfin le clan d’autosuffisante de naissance pour ainsi dire ? Il y a ceux qui ne rentrent pas dans les catégories mais qui prennent autant de peine pour installer l’ardente nécessité de réaliser que nous sommes tous confinés derrière ce bras de mer, sur le même bateau, et que ce qui porte une atteinte indécente à la moindre vie d’un quartier ou d’un citoyen de cette ville porte atteinte non seulement à la dignité collective, menace notre existence mais compromet principalement ce que

nous avons de plus urgent à faire : restaurer un équilibre de pouvoir sans distinction de catégorie sociale et économique. Il est temps de déconfiner les mentalités et d’installer une horizontale plénitude de tous les Moroniens. Il ne faut pas croire, le premier arrivé n’est pas le premier servi dans cette ville.

Moroni dérive, nous disons qu’aujourd’hui qu’elle devrait appartenir à ses entités multiples et à ses différences, qui font d’ailleurs notre ressemblance ! En tant que capitale des Comores, Moroni est pour nous tous et l’organisation de la collectivité reviendrait à l’Etat pour épargner des troubles et des confusions. Mais quel Etat ? Un Etat, osons le dire, qui ne parvient pas à se gouverner elle- même serait-il en mesure de gouverner ses périmètres ? me dirait-on !

Moroni, hormis sa particularité d’être la capitale des Comores, c’est une ville comme une autre, bien sûr mais différente des autres, ses diversités et ses singularités. Elle abrite des identités multiples issues d’autres villes et de villages alentours ainsi que les iles sœurs. C’est sa beauté de toujours.

Nous n’avons pas à considérer des identités anciennes comme une essence à préserver, car c’est un feu fragile à maintenir par des procédés discriminatoires méprisables, méprisants et racistes.

Les décisions doivent être prises par une commission structurée et légitime qui représenterait toutes les catégories, au mieux, de notre société, les vrais gardiens de la ville, de ses mœurs et traditions.

Aucun clan, n’ait un monopole décisionnel de cette ville, qu’il soit familial ou d’une quelconque posture sociale.

Cela aujourd’hui est inadmissible.

La ville est aujourd’hui administrée et gouvernée par procuration. Les décisionnaires sont si bien éloignés des réalités du terrain, et qu’il est inadmissible d’être aussi lointain de la vie des gens que de prétendre décider pour leur sort. Nous ne sommes plus dans l’indigénat colonial et nul ne doit se soumettre pour une quelconque raison. Nous combattons la verticalité des postures et laissons-nous les possibilités de décider de notre sort collectivement pour que nous accédions à une

conscience positivée de nous-mêmes et sans complexe. Cette manière de concevoir les choses est essentielle.

La douloureuse expérience coloniale nous apprend que les décisions par procuration qu’il est des vieilles manières qui bouleversent la vie et les assises de nos consciences. Chemin faisant, nos manières de faire ancestrales nous désespèrent et bouleversent, encore une fois, des oies abîmées au fond de nous. Cependant, nous sommes contraints autour d’une même table débattre collectivement au risque de sombrer ensemble collectivement. Choses vivantes, ô choses excellentes.

Laissez- nous décider de notre sort.

Moroni dérive, il est temps d’arrêter si vous voulez prendre vos décisions de dire « Womdji Wamba wukaya, hawu, Wa décidé Wukaya……. ». Ce sont ainsi de parler de vous à la troisième personne. Il est des moments où nous nous demandions si nous n’étions pas gouvernés par des fantômes, à défaut de s’interroger sur l’identité des vrais décisionnaires de cette ville à savoir, l’Etat ou le clan Wandru- Wadzima ?

Nous vous convions de bien réfléchir sur l’intensité d’une situation cruciale et délicate afin de parvenir à organiser et à préserver au mieux ce que nous estimons être bénéfiques pour les générations futures. Peut-être pour nous en attendant.

Nous sommes autour de vous emportés par le grand chant d’estime de notre ville et ce chant d’estime nous mobilise et sachez que nous n’avons aucune accroche de rancœurs et de raideurs contre quiconque ! Tout simplement, nous ne livrerons notre ville aux assassins de l’aube !

Déconfinons nous les consciences !

Mohamed Ali MROIMDJI, Enseignant.

HaYba FM la Radio Moronienne du Monde

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