
Depuis des années, Mayotte fait face à une pression migratoire intense, alimentée par des flux massifs de populations venues principalement des Comores. Cette situation, combinée à une démographie galopante et à des tensions sociales croissantes, pousse les autorités à rechercher des solutions adaptées. Parmi les mesures en discussion figure la suppression des titres de séjour territorialisés, qui ne permettent aux étrangers en situation régulière de résider qu’à Mayotte, sans possibilité de se déplacer vers La Réunion ou la métropole.
Actuellement, les étrangers en situation régulière à Mayotte sont contraints de rester sur l’île, faute de pouvoir circuler librement sur le reste du territoire français. Cette restriction, bien qu’instaurée dans le but de limiter la migration vers la métropole, semble avoir eu des effets contre-productifs : les étrangers, ne pouvant quitter Mayotte, contribuent à l’augmentation rapide de la population locale, créant des tensions sur les infrastructures, l’emploi et le logement.
Certains experts estiment que cette mesure de confinement territorial a transformé Mayotte en une « prison à ciel ouvert » pour de nombreux résidents réguliers. En conséquence, une alternative pourrait consister à permettre aux détenteurs de titres de séjour de Mayotte de se déplacer librement vers d’autres départements français. Cette solution, bien que radicale, pourrait contribuer à réduire la pression démographique sur l’île en offrant aux étrangers une issue légale pour quitter Mayotte.
En avril 2024, le gouvernement avait promis de mettre fin aux titres de séjour territorialisés dans le cadre d’une réforme globale sur la gestion de l’immigration à Mayotte. Cependant, cette réforme est restée bloquée jusqu’à présent, notamment en raison de divergences politiques et d’oppositions locales. Certains élus redoutent qu’une telle mesure entraîne un afflux important d’étrangers vers la métropole, aggravant ainsi la situation migratoire nationale.
Malgré ce blocage, la pression sur le gouvernement reste forte. De nombreuses associations et acteurs locaux continuent de plaider pour une réforme rapide, estimant qu’elle pourrait non seulement améliorer les conditions de vie des étrangers, mais aussi apaiser les tensions sociales sur l’île.
Permettre aux détenteurs de titres de séjour à Mayotte de voyager librement vers la métropole ne signifie pas ouvrir les frontières de manière incontrôlée. Cela pourrait, au contraire, offrir une voie légale de mobilité qui éviterait les flux clandestins et les situations précaires sur l’île. En donnant aux étrangers une alternative légale pour quitter Mayotte, la pression démographique locale pourrait diminuer, tout en répartissant les flux migratoires sur l’ensemble du territoire français.
De plus, une telle réforme s’accompagnerait de mesures de contrôle renforcées aux frontières maritimes, afin de limiter les arrivées clandestines et de stabiliser la situation à long terme. Cela impliquerait également une meilleure coopération régionale, notamment avec les Comores, pour réguler les flux migratoires dans cette zone stratégique de l’océan Indien.
Face à l’urgence de la situation, il devient clair que les solutions classiques ne suffisent plus. Alors que certains prônent un durcissement des mesures de contrôle et de répression, d’autres considèrent qu’il est temps d’adopter une approche différente, plus audacieuse, visant à offrir plus de droits et de mobilité aux étrangers en situation régulière.
Si cette solution venait à être adoptée, elle pourrait bien transformer en profondeur la gestion de l’immigration à Mayotte et poser les bases d’un équilibre durable entre réduction de la pression migratoire locale et respect des droits fondamentaux des étrangers.
En définitive, la question reste ouverte : et si, paradoxalement, la meilleure façon de lutter contre l’immigration incontrôlée à Mayotte était d’ouvrir davantage les portes de la mobilité légale ?
SAID Hassan Oumouri
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