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Coronavirus : Où est l’État ?

Depuis maintenant deux semaines, le centre d’isolement de huit chambres préfabriquées se fait toujours attendre. A El-maarouf, plus grand hôpital du pays, aucun espace prévu pour accueillir les éventuels patients contaminés par le coronavirus. Les médecins, sans équipements de protections individuels, tremblent comme une feuille. Les ulémas, au lieu de sensibiliser sur les gestes de prévention, justifient la pandémie par « les péchés de l’homme »…

Le coronavirus est déjà dans l’archipel, notamment dans l’île comorienne de Mayotte sous administration française. Jusqu’aujourd’hui, aucune mesure digne de ce nom n’est prise par les autorités comoriennes. Les déclarations et rencontres officielles, ce ne sont pas celles-là qui manquent. Le 29 février, après que l’OMS ait annoncé la veille que la menace était « très élevée » au niveau international, le chef de l’État a réuni son gouvernement en conseil des ministres extraordinaire.

Devant les médias, le ministre de la santé a annoncé la construction d’un centre d’isolement devant l’aéroport de Hahaya, et dont la livraison était attendue « incessamment ». Deux semaines après, le fameux centre de huit chambres préfabriquées se fait toujours attendre alors qu’en dix jours seulement, la Chine, épicentre du virus, a construit un hôpital d’une capacité de 2000 lits pour accueillir les personnes contaminées.

Avec un budget de guerre qui frôle le milliard de nos francs, un conseil des ministres exceptionnel, des formations qui entrent dans le plan de lutte et de prévention, les autorités faisaient montre de responsabilité pour rassurer l’opinion. Hélas elles fendent l’armure quand on sait combien elles étaient dépassées face à un cas suspect il y a de cela une dizaine jours. Elles ne savaient plus sur quel pied danser avec un patient refoulé de l’hôpital de Samba par la seule volonté d’une poignée de jeunes.

A El-maarouf, hôpital dite de référence nationale, les médecins vacillent. Contacté par La Gazette des Comores, le chef du service des urgences a promis de nous rappeler plus tard après lui avoir demandé les dispositions prises pour la prise en charge d’éventuels patients porteurs du virus mortel. Il ne nous a jamais rappelé. Un autre chef de service, sous couvert d’anonymat, nous confie que le centre hospitalier ne dispose pas d’un espace médical réservé à cet effet. Qui pis est, les médecins n’ont pas d’équipements de protection individuelle. La peur au ventre, si ce n’est peu dire.

Malgré les millions débloqués par les partenaires, la campagne de sensibilisation sur les gestes barrières laisse à désirer. Les espaces publics ne semblent pas avoir conscience de la gravité de la pandémie. Des ulémas, au lieu de sensibiliser, s’en délectent pour battre en brèche les occidentaux et « leurs péchés », cause, selon eux, du coronavirus. N’est-il pas temps de leur imposer (oui, imposer) un autre discours qui sera à même de sauver des vies, que de les laisser verser dans la polémique et l’abêtissement de l’opinion ?

Quand est-ce que l’État va-t-il s’affirmer dans cette crise ? Quand est-ce qu’il va entendre les voix qui s’élèvent, à l’instar de Salim Ali Amir, qui demandent, avant qu’il ne soit trop tard, la suspension temporaire des vols de et vers les pays impactés, la fermeture provisoire des établissements scolaires, la limitation drastique des rassemblements (politiques, sociaux ou religieux) ?

Andjouza Abouheir/LGDC

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