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Cinquante ans d’indépendance : quand la classe politique comorienne oublie l’essentiel

Il est des anniversaires qui devraient marquer une nation, rassembler son peuple, éclairer son avenir. Mais aux Comores, le cinquantenaire de l’indépendance, célébré le 6 juillet 2025, a surtout mis en lumière un échec retentissant : celui d’une classe politique incapable de faire de l’éducation et de la formation professionnelle un pilier de développement national. Au lieu d’un moment de réflexion profonde, cette commémoration s’est réduite à une série de concerts festifs, éclipsant l’urgence d’un vrai bilan et d’un projet commun pour l’avenir.

Dans un contexte national marqué par l’instabilité politique, les tensions sociales et une jeunesse en quête de repères, ce 6 juillet aurait dû être l’occasion d’un sursaut collectif. Les attentes étaient grandes : des forums, des débats ouverts, des rencontres intergénérationnelles, des diagnostics partagés sur les défis de l’éducation, de la santé, de la justice ou encore de l’économie. Mais au final, la parole présidentielle, pourtant ambitieuse dans sa forme, est restée sans suite.

« Je m’attendais à voir de véritables concertations. Des échanges entre toutes les composantes de notre pays : les autorités, l’opposition, la société civile, les étudiants… Il fallait surtout dresser un vrai bilan après 50 ans d’indépendance, mais aussi réfléchir sur notre avenir », confie un sociologue et enseignant à l’Université des Comores. Un avis largement partagé dans une société comorienne qui peine à comprendre comment, après un demi-siècle, des besoins aussi fondamentaux que l’accès à l’eau potable, à l’électricité ou à un emploi décent restent encore non satisfaits.

L’exemple le plus criant de cet échec reste celui du secteur éducatif. À l’heure où d’autres nations insulaires investissent massivement dans la formation des jeunes, les Comores continuent de négliger leur système éducatif, de la maternelle à l’université. Les infrastructures sont vétustes, les enseignants mal formés ou sous-payés, les programmes souvent déconnectés des réalités économiques. Quant à la formation professionnelle, elle demeure marginale, sans vision ni moyens.

Pourtant, le chef de l’État avait, dans son discours du 3 avril 2025 à Mitsoudjé, appelé à une évaluation sincère du chemin parcouru, avant de projeter le pays vers l’émergence en 2030. Il avait promis l’organisation de tables rondes sur des thématiques clés : santé, éducation, justice, économie. Mais rien n’a suivi, si ce n’est quelques Assises nationales sur l’éducation, dont les recommandations peinent à voir le jour.

En attendant, Moroni, notre capitale, ne reflète toujours pas l’image d’un centre administratif et économique moderne. Son aéroport, loin des standards internationaux, peine à accueillir dignement les visiteurs. Et pendant que nos voisins – Maurice, Madagascar ou la Tanzanie – modernisent leurs infrastructures et misent sur la jeunesse, les Comores semblent engluées dans une routine politique sans horizon.

« Pratiquement aucun secteur ne fonctionne correctement », souligne notre interlocuteur universitaire. « Nous avons un petit pays, avec une population formidable, qui ne demande qu’à vivre en paix. Mais encore faut-il que les dirigeants en aient la volonté politique. »

En transformant une date historique en simple fête musicale, le pouvoir a raté l’opportunité de fédérer, d’écouter, de construire. Ce cinquantenaire aurait dû être une boussole pour les générations futures. Il s’est mué en un symbole d’improvisation, d’oubli et d’errance politique.

Il est encore temps de se ressaisir. Mais pour cela, il faudra, au-delà des discours, une véritable refondation de notre contrat social, où l’éducation et la formation professionnelle ne seront plus des options, mais des priorités nationales. Car aucun pays ne peut se bâtir sans investir dans l’intelligence et les compétences de son peuple.

IBM

En 2016, une maman a déposé une importante quantité d’or à La Meck Moroni en garantie d’un prêt. Après avoir intégralement remboursé ce prêt, l’or aurait dû lui être restitué, mais il a été volé. L’institution a reconnu sa responsabilité, mais depuis, elle garde un silence troublant. Aucun geste de réparation n’a été fait. Méfiez-vous : cette structure n’est pas digne de confiance.

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