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Le 6 juillet 2025, les Comores ont cĂ©lĂ©brĂ© le 50ᵉ anniversaire de leur indĂ©pendance dans une atmosphère Ă la fois festive, culturelle… et profondĂ©ment politique. Si l’Ă©vĂ©nement a marquĂ© un moment historique dans l’archipel, il a Ă©galement rĂ©vĂ©lĂ© les lignes de fracture qui traversent la sociĂ©tĂ© comorienne.
Une célébration grandiose et diplomatique à Moroni
Le cœur des festivités officielles a battu cette année au stade omnisports de Malouzini, une première dans l’histoire des célébrations nationales. Habituellement, la Place de l’Indépendance à Moroni accueille les grandes commémorations. Le choix du stade Malouzini, plus vaste et moderne, traduit la volonté du gouvernement de faire de ce cinquantenaire une démonstration de puissance et d’organisation.
Le prĂ©sident Azali Assoumani y a prononcĂ© un discours centrĂ© sur l’unitĂ© nationale, la culture comme socle de dĂ©veloppement, et le destin commun des Ă®les. Plus de 400 invitĂ©s internationaux, dont des chefs d’État africains et diplomates venus de Chine, de Tanzanie, du Maroc ou encore de France, ont assistĂ© Ă la parade militaire et aux nombreuses animations prĂ©vues pour l’occasion. Le gouvernement avait promis « la plus grande fĂŞte jamais vue dans l’histoire des Comores », et il a tenu parole en termes de visibilitĂ© et de logistique.
De nombreux événements culturels ont accompagné les cérémonies : danses traditionnelles, concerts, salons d’artisanat (SIACOM), festivals (Daradja) et compétitions sportives ont rythmé les jours précédant et suivant le 6 juillet.
 Une fête aussi marquée par la contestation
Mais derrière l’apparat, une autre réalité s’est imposée : le caractère éminemment politisé de cette célébration. Plusieurs figures et partis de l’opposition ont boycotté la cérémonie officielle et se sont réunis dans la ville de Mbeni, bastion traditionnel de l’opposition dans le nord de Ngazidja. Ce rassemblement parallèle avait pour but de dénoncer la mainmise du pouvoir sur les symboles nationaux, et de rappeler que la fête de l’indépendance appartient au peuple tout entier, pas uniquement au gouvernement en place.
Le choix de déplacer les festivités de la Place de l’Indépendance vers un stade clôturé et ultra-sécurisé a été perçu par certains comme un moyen d’écarter la population de la rue et de contrôler l’image de la fête. Cette décision a accentué le sentiment d’exclusion ressenti par une partie de la société civile et politique.
 En diaspora, Marseille a vibré
En France, et plus particulièrement à Marseille, la communauté comorienne a aussi marqué ce 50ᵉ anniversaire. Le Parc Bougainville, dans les 2ᵉ et 3ᵉ arrondissements, a accueilli une grande soirée populaire, animée par des artistes comme DJ Ali Moradisc, Thabiti, ZAZA, Says’z ou Guirri Mafia. Entre musique, danse, gastronomie et drapeaux brandis fièrement, l’ambiance était à la fête, mais aussi à la mémoire et à la fierté d’une histoire collective.
Ces moments festifs à Marseille, bien que moins formels, ont permis de resserrer les liens entre la diaspora et la mère patrie, dans une ambiance libre, sans enjeu politique apparent, mais avec un sentiment fort d’appartenance.
 Une célébration miroir des tensions nationales
Ce 6 juillet 2025 restera donc dans les mémoires comme une date importante, à la fois pour le faste de la célébration et pour ce qu’elle a révélé : une nation riche de sa culture et de sa jeunesse, mais encore divisée politiquement. Tandis que le gouvernement affichait sa puissance diplomatique et son sens de l’organisation, l’opposition rappelait, depuis Mbeni, que la démocratie ne se célèbre pas à huis clos.
Ce cinquantenaire n’a pas seulement été une fête : il a aussi été le reflet d’une lutte pour la légitimité, pour la symbolique, et pour l’avenir des Comores.
ANTUF ChaharaneÂ
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