
Dans l’océan Indien, les Comores se distinguent tristement par leurs tarifs Internet parmi les plus élevés au monde. Alors qu’à Madagascar, un forfait de 10 Go coûte environ 2 €, ce même volume est proposé à 20 € aux Comores. Cet écart considérable met en lumière une fracture numérique qui handicape le pays. Pour comparaison, en Tanzanie, ce forfait coûte 4 €, au Kenya 6 €, et aux Seychelles 10 €, des tarifs bien plus accessibles pour leurs populations respectives.
Ces tarifs exorbitants rendent l’accès à Internet inaccessible pour une grande partie des Comoriens, qui doivent consacrer une part disproportionnée de leurs revenus pour se connecter. Cette situation freine l’accès à l’éducation, à l’information et aux opportunités économiques, plaçant le pays à la traîne dans un monde où la connectivité est un moteur essentiel de développement.
Pour aggraver la situation, de nombreux consommateurs se plaignent d’anomalies récurrentes : perte soudaine de données, incohérences après rechargement de crédit, et qualité de service décevante. Ces problèmes accentuent encore le mécontentement d’une population déjà confrontée à des prix élevés.
La fibre optique : une autoroute sous-exploitée
L’accès limité à Internet aux Comores peut être comparé à une autoroute flambant neuve où les véhicules sont obligés de rouler à 40 km/h, alors qu’elle est conçue pour permettre une vitesse de 100 km/h. Cette « autoroute », c’est la fibre optique, dont les capacités restent sous-utilisées. Pourtant, les coûts d’investissement pour cette infrastructure sont déjà couverts par l’État via ce que l’on appelle des liaisons STM (Synchronous Transport Module). Que les Comoriens roulent à 40 ou à 100 km/h, le prix de cette infrastructure reste le même.
Cependant, au lieu de permettre une exploitation optimale de cette technologie, les opérateurs limitent la vitesse et le volume des connexions, laissant les Comoriens payer plus cher pour moins. Cela freine non seulement les utilisateurs, mais aussi l’économie du pays, qui pourrait bénéficier d’une connectivité plus rapide et plus accessible.
Les forfaits proposés par les opérateurs aux Comores ne sont pas en adéquation avec le pouvoir d’achat de la population. À titre d’exemple, un forfait Internet de base à 15 000 francs comoriens (environ 30 €) ne suffit pas à couvrir les besoins d’un utilisateur moyen pendant un mois. En comparaison, ce montant permettrait d’accéder à des services bien supérieurs dans d’autres pays de la région.
Pourtant, une baisse des prix pourrait être bénéfique pour toutes les parties : en rendant l’Internet plus accessible, les opérateurs pourraient attirer davantage de clients et augmenter leurs profits. Cette dynamique s’observe dans de nombreux pays où la connectivité universelle est devenue un levier de croissance.
Une solution passe par une meilleure régulation du marché, à travers une intervention active de l’ANERTIC (Autorité Nationale de Régulation des TIC). Cette instance devrait centraliser les données et imposer une transparence aux opérateurs pour garantir des pratiques équitables. De plus, l’État, en tant qu’investisseur principal dans les infrastructures comme la fibre optique, devrait exiger une utilisation optimale de ces ressources pour le bénéfice des citoyens.
L’objectif doit être clair : permettre aux Comoriens de « rouler » à pleine vitesse sur l’autoroute numérique, sans qu’ils aient à payer des prix exorbitants pour des services de qualité médiocre.
Les Comores ont l’opportunité de se hisser au niveau de leurs voisins en matière de connectivité, à condition de revoir les politiques tarifaires et d’encourager une meilleure utilisation des infrastructures existantes. En offrant un Internet rapide, abordable et fiable, le pays pourrait accélérer son développement économique, social et culturel, ouvrant ainsi la voie à une prospérité partagée pour tous ses citoyens.
ANTUF Chaharane
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