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Kwassa kwassa : l’échec de la politique du mur

Sept morts, dont quatre enfants, six disparus. Le chavirage d’un kwassa kwassa entre Anjouan et Mayotte a endeuillé de nombreuses familles comoriennes. Un nouveau drame de l’immigration clandestine dans ce bras de mer de 80 kilomètres qui sépare les deux îles et qui a déjà englouti des milliers de vies dans des circonstances analogues.

Cette catastrophe ne sera sûrement pas la dernière. Le ministre de l’Outre-mer Victorin Lurel, qui sera en visite officielle dimanche à Mamoudzou, n’a rien dit d’autre en déclarant, hier à Saint-Denis, qu’en raison de l’attractivité de Mayotte, « il existera toujours des flux migratoires et il sera difficile de les endiguer ».
Toute la question est de savoir par quels moyens il serait possible d’empêcher ces catastrophes humaines. Seule certitude : les recettes miracles n’existent pas. Victorin Lurel, comme d’autres au PS, estiment que c’est en améliorant la coopération et le développement des infrastructures sanitaires et scolaires d’Anjouan, ainsi que l’agriculture locale, que le nombre de candidats au départ, désespérés par une vie de misère, diminuera.
Chiche, a-t-on envie de lui répondre. Car depuis 2007, Nicolas Sarkozy et son gouvernement ont à maintes reprises prôné cette fameuse voie diplomatique. Mais l’on attend toujours en vain de voir ce qui aurait pu ressembler à une politique volontariste et ambitieuse de coopération avec le voisin comorien.
En revanche, des moyens conséquents ont été consacrés pour interdire aux kwassa kwassa d’arriver jusqu’à Mayotte : renforcement des patrouilleurs maritimes, installation de nouveaux radars, effectifs supplémentaires dans les forces de l’ordre.
Le nouveau drame survenu dans la nuit de jeudi à vendredi illustre de façon tragique que cette volonté de construire un mur autour du 101e département français pour le protéger des clandestins. Selon les chiffres officiels, 26 405 personnes, dont 5 389 enfants, ont été expulsées de Mayotte l’an dernier après avoir été retenues dans « des conditions indignes », selon le défenseur des droits, Dominique Baudis. On sait aussi que nombre de Comoriens reconduits à la frontière finissent par revenir à Mayotte. Pour éviter d’être pris et repérés, les passeurs n’ont jamais hésité à prendre tous les risques en utilisant des routes plus longues et périlleuses. Cette politique créé « des drames humains » et des « tensions importantes à Mayotte », constate dans un rapport le président de la commission des lois au Sénat, Jean-Paul Sueur. Elle est aujourd’hui qualifiée de « coûteuse et au total inefficace ».
Ce sénateur PS qui a signé son rapport avec un député UMP estime qu’il est temps de trouver « des solutions alternatives ». Suite à ce nouveau drame, Victorin Lurel va devoir être beaucoup plus précis. Et peut-être devrait-il prendre le temps de se rendre à Moroni.


Jérôme Talpin
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