À Ndzuwani, une situation préoccupante persiste depuis plusieurs années. De nombreux jeunes affirment qu’ils n’ont jamais reçu leur diplôme du baccalauréat, parfois plus de six ans après avoir obtenu l’examen. Selon plusieurs témoignages recueillis sur place, les derniers diplômes disponibles sur l’île remonteraient à la session 2018, laissant ainsi les promotions 2019, 2020, 2021, 2022, 2023 et 2024 dans un vide administratif total.
Cette absence de diplômes crée des obstacles majeurs pour les étudiants. Le document officiel du baccalauréat est indispensable pour s’inscrire dans une université, demander un visa, poursuivre une formation professionnelle ou monter un dossier administratif. De nombreux jeunes originaires de Ndzuwani expliquent avoir perdu des opportunités d’études à l’étranger ou avoir vu leur admission annulée faute de pouvoir présenter leur diplôme.
Plus inquiétant encore, plusieurs bacheliers témoignent de pratiques frauduleuses autour de la délivrance des diplômes. Selon leurs récits, certains agents ou intermédiaires exigeraient des paiements allant jusqu’à 100 000 francs comoriens pour « accélérer » la remise du document. Aucun communiqué officiel n’a confirmé ces dérives, mais la fréquence des témoignages montre l’ampleur du malaise. Dans un système normal, tout bachelier reçoit gratuitement son diplôme. Si certains doivent désormais payer pour l’obtenir, cela révèle un dysfonctionnement grave au sein de l’administration.
Cette situation soulève également des questions sur la gestion des frais de dossier payés chaque année par les candidats au bac. Ces frais sont censés couvrir l’organisation des épreuves, l’impression des diplômes et la distribution dans les trois îles. Pourtant, aucune remise de diplômes n’a été effectuée à Ndzuwani depuis 2019. Il devient légitime de s’interroger sur l’utilisation réelle de ces fonds et sur la chaîne de responsabilité administrative.
Les habitants de Ndzuwani parlent d’une rupture d’égalité entre les îles. Alors que Ngazidja et Mwali semblent recevoir leurs diplômes avec beaucoup moins de retard, l’île de Ndzuwani accumule un retard historique qui pénalise toute une génération. Ce sentiment d’injustice s’ajoute à une frustration croissante au sein des familles, des enseignants et des anciens élèves.
Il est urgent que les autorités éducatives prennent position. Le ministère de l’Éducation et l’ONEC doivent expliquer clairement les raisons de ce blocage, publier un calendrier précis de distribution et engager une enquête sur l’existence éventuelle de pratiques frauduleuses. Une clarification sur l’usage des frais de dossier devient également indispensable pour restaurer la confiance.
Aujourd’hui, des centaines de jeunes se retrouvent dans l’impossibilité d’avancer dans leurs projets d’études ou de carrière, simplement parce qu’ils ne disposent pas d’un document qu’ils ont pourtant mérité. Dans un pays où le système éducatif fait déjà face à de nombreux défis, laisser six promotions sans diplôme officiel représente un échec institutionnel majeur. Les bacheliers de Ndzuwani demandent seulement ce qui leur revient : la reconnaissance administrative de leur réussite.
ANTUF Chaharane


Réagissez à cet article