L’île comorienne de Mayotte, administrée par la France, s’enfonce dans une crise sanitaire que beaucoup refusent encore de regarder en face. Derrière les façades officielles, une épidémie avance masquée : près d’une vingtaine de nouveaux cas de VIH sont détectés chaque mois, un rythme inquiétant pour un territoire aussi petit et déjà fragilisé par de multiples urgences sociales.
Pour Moncef Mouhoudoire, directeur de Nariké M’sada, la situation a dépassé depuis longtemps le stade de l’inquiétude. « Les chiffres ne sont pas alarmants, ils sont graves. Ils étaient alarmants il y a deux, trois ou cinq ans », a-t-il lancé sur les ondes du Zakweli. Son constat est sans appel : Mayotte navigue en plein cœur d’une épidémie sous-marine, invisible car largement sous-dépistée.
« On est dans un contexte de sous-dépistage. Il y a une épidémie cachée, beaucoup de gens ont le VIH sans le savoir. »
Ce manque de dépistage retarde considérablement la prise en charge. Près de 30 % des personnes dépistées arrivent déjà à un stade avancé de séropositivité, une situation dramatique sur un territoire où l’accès aux soins est difficile, les structures saturées et les ruptures de personnel fréquentes.
Contrairement à certaines idées reçues, le virus ne concerne pas uniquement les personnes migrantes. Moncef Mouhoudoire insiste : toutes les couches de la société mahoraise sont touchées, y compris des citoyens français résidant sur l’île certains préférant même se faire dépister à l’extérieur du territoire pour éviter d’être identifiés localement.
Face à cette situation explosive, le directeur de Nariké M’sada appelle les collectivités locales et l’État français à « s’intéresser davantage à la santé ». Pour lui, l’inaction actuelle revient à laisser le virus circuler librement dans une population déjà vulnérable.
À Mayotte, la pauvreté, la promiscuité, l’accès difficile aux soins, la défiance envers les institutions et la marginalisation créent un cocktail qui alimente la progression silencieuse du VIH. L’île risque de devenir l’un des foyers les plus préoccupants de l’océan Indien si rien n’est fait immédiatement.
IBM


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