
À Anjouan, l’île la plus montagneuse et la plus densément peuplée des Comores, la nature s’effondre à grande vitesse. Selon le ministre de l’Environnement Abubakar Ben Mahmoud, 80 % des forêts naturelles ont disparu entre 1995 et 2014. Aujourd’hui, seuls les massifs les plus inaccessibles résistent encore à la hache et aux flammes.
Avec plus de 325 000 habitants sur 424 km², la pression démographique est énorme. Les familles défrichent la montagne pour cultiver, tandis que d’autres activités fragilisent davantage les écosystèmes : la production d’huile essentielle d’ylang-ylang, gourmande en bois pour alimenter les alambics, et la fabrication traditionnelle de portes sculptées.
Les conséquences sont dramatiques pour la population elle-même. Les rivières qui alimentaient autrefois l’île s’assèchent. « En 1925, il y avait 50 cours d’eau permanents. Aujourd’hui, il en reste moins de dix », alerte Bastoini Chaambani de l’ONG Dayima. Sans forêt, c’est l’eau, l’agriculture et la vie quotidienne qui disparaissent.
Pour répondre à ce défi vital, l’ONG locale Dahari travaille avec des agriculteurs devenus « gardiens de l’eau ». Moyennant un contrat de cinq ans, ils s’engagent à reboiser ou laisser leurs terres en jachère, en échange d’une compensation financière.
Certains producteurs d’ylang-ylang adoptent aussi des techniques modernes, réduisant leur consommation de bois grâce à de nouveaux alambics. Mais ces efforts restent encore trop faibles face à l’ampleur du désastre.
Le gouvernement promet de lancer une campagne nationale de reboisement, impliquant directement la population. Mais le temps presse : si rien n’est fait, les habitants d’Anjouan risquent de voir disparaître leurs ressources en eau, leurs revenus agricoles et, à terme, leurs moyens de survie.
Said Hassan Oumouri
Réagissez à cet article